La décarbonation énergétique imposée :  une autre voie de domination sur l’Afrique ?

Au cœur de la discussion sur l’avenir de la planète face aux changement climatiques et la décarbonation de l’énergie, l’Afrique se trouve à la croisée des chemins, cherchant à définir son avenir énergétique dans un contexte où les pressions environnementales rencontrent les aspirations au développement. Alors que la transition vers des énergies décarbonnées est promue comme la voie à suivre, il est impératif de comprendre les défis spécifiques que l’Afrique affronte dans ce paysage complexe.

Cet article explore les nuances de la transition énergétique en Afrique, examinant les propositions mondiales, les réalités locales et les perspectives futures. En nous appuyant sur des analyses critiques et des voix influentes du continent, nous plongeons dans les complexités de cette quête énergétique, mettant en lumière les dilemmes, les opportunités et les voies possibles vers un avenir énergétique durable pour l’Afrique.

Dans l’ère actuelle où la sensibilisation au carbone et au développement durable est à son apogée, les énergies décarbonnées sont présentées comme la solution incontournable pour réduire les émissions et promouvoir l’atténuation des impacts climatiques. Cependant, l’Afrique se trouve à un carrefour critique, où les initiatives mondiales semblent imposer des normes exigeantes, bien que le continent ne soit responsable que de 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Après des décennies de colonisation et d’exploitation de ses ressources naturelles, l’Afrique, en quête de développement, se retrouve face à des propositions qui soulèvent des interrogations légitimes. Malgré un discours bien intentionné sur la préservation de la planète, les Africains se demandent si les règles du jeu seront toujours en leur défaveur.

L’article de ‘Connaissances des Énergies’ sur le mix énergétique prévu en Afrique d’ici 2030 a suscité notre réflexion sur la transition énergétique imposée au continent. Actuellement, 80% de la production électrique africaine provient des énergies fossiles, avec seulement 15% provenant de l’hydroélectricité, et moins de 8% combinés pour l’éolien et le solaire. Les chercheurs mettent en garde contre une trajectoire “haut carbone” pour des décennies, à moins d’un “choc de décarbonation” rapide, impulsé par les gouvernements africains avec un réorientement des financements internationaux.

L’accès à l’électricité est indispensable pour sortir le continent africain de la pauvreté. C’est un fait ! Sur l’ensemble du continent, plus de la moitié des 54 pays africains affichent un taux d’électrification de moins de 20 %. (Khaled Igué) Il est essentiel de parler franchement de cette question. Le besoin est évident et il existe plusieurs alternatives qui peuvent être explorées en tenant compte des spécificité de chaque pays (climat, moyens financiers, etc.).  

Des voix éminentes ont donné leurs avis sur le sujet de plusieurs manières.

Nous avons par exemple Alain FOKA, journaliste d’investigation et initiateur du collectif MANSSAH, une formalisation du rassemblement des africians pour proposer et faire des projets concrets en vue de développemer réellement l’Afrique.  Ce dernier aborde terre à terre les sujets de gestions des ressources naturelles, de souveraineté énergétique et économique, de quoi nous donner un angle neuf pour aborder ce sujet. Il y’a aussi le fougueux président du Kenya , William Ruto qui ne manque pas à chaque prise de parole de rappeler que l’Afrique a son mot à dire dans les propositions qui sont faites à l’échelle mondiale et a su orgnaiser avec brio la première conférence climatique Africaine.

D’autres interventions comme celle de Guillaume Meunier après consultation de la plateforme du GIEC et analyse des impacts du changement climatique sur les pays Africains en comparaison à ceux de l’Europe a su conclure sur la nécessité d’agir tous. ‘Réduire les consommations du côté de l’Europe peut être’.(Ecobuilder). Ce dernier souligne la nécessité d’une action collecitve et donc il serait bien de faire des propositions équitables. 

 

“… Et là où en France d’ici 2050, ce nombre peut augmenter au maximum d’une dizaine de jours selon le scénario choisi, au Maroc cela peut aller à 41 jours (oui 4 fois plus), soit presque un mois et demi !Gros impact donc et pourtant le Maroc c’est 0,2% des émissions mondiales seulement. Voilà, c’est ça le changement climatique, tu imposes tes problèmes aux autres et tu tentes de ne rien faire en disant que ce n’est pas de ta faute.”

Guillaume MEUNIER, IFPEB

Le message essentiel de notre analyse réside dans la nécessité de concevoir la transition énergétique en plaçant en tête de liste la satisfaction des besoins des populations. Pour y parvenir, chaque pays parmi les 54 qui composent le continent doit élaborer une stratégie en fonction de ses ressources disponibles (gaz, charbon, eau, soleil) et alignée sur son plan de développement.

Bien que l’Afrique détienne un potentiel solaire considérable, elle ne dispose pas encore, à l’échelle des 54 nations, des technologies ni des moyens nécessaires pour concrétiser ces projets d’envergure. Certains pays, tels que le Maroc, se distinguent par des initiatives remarquables telles que le champ solaire de Ouarzazate, offrant un exemple galvanisant pour les nations de la zone sahélienne.

(180908) — OUARZAZATE, Sept. 8, 2018 (Xinhua) — Photo provided by Shandong Electric

Cependant, une question cruciale se pose quant à l’acquisition des compétences par les Africains, les rendant indépendants et leur permettant de devenir des experts et des acteurs des solutions qu’ils valident et mettent en œuvre. Pour explorer davantage cette problématique, examinons les autres régions du continent africain. Les régions du centre de l’Afrique, qui bénéficient d’un potentiel hydroélectrique important, pourraient envisager de capitaliser en priorité sur cette ressource abondante avant de redéfinir leur projet de mix énergétique.

Le développement de compétences locales est un élément clé pour garantir la pérennité des projets énergétiques en Afrique. Plutôt que de dépendre de compétences extérieures, investir dans la formation et le développement des compétences locales permettrait aux Africains de devenir des acteurs majeurs de la conception, de la mise en œuvre et de la gestion de leurs propres solutions énergétiques. En particulier, dans les régions dotées de ressources spécifiques, comme le potentiel hydroélectrique dans le centre de l’Afrique, cette approche pourrait offrir une voie vers une indépendance énergétique durable.

Les vastes potentiels hydroélectrique et solaire du continent africain ouvrent des horizons prometteurs pour répondre aux besoins énergétiques des populations. Dans cette optique, il devient essentiel que les États souverains élaborent des projets énergétiques réfléchis, s’émancipant des contraintes externes. L’Afrique, avec son potentiel hydroélectrique significatif et son exposition abondante au soleil, dispose de ressources naturelles clés pour soutenir son développement énergétique. Cependant, pour maximiser ces potentiels, les gouvernements africains doivent être les architectes de leurs propres plans énergétiques, échappant aux pressions extérieures qui pourraient détourner leurs objectifs.

Cela implique la mise en place de politiques énergétiques adaptées aux spécificités locales, prenant en compte les caractéristiques géographiques et climatiques de chaque région. En favorisant une approche décentralisée, les États peuvent exploiter au mieux les ressources disponibles et répondre de manière efficace aux besoins énergétiques de leurs populations. Les projets doivent être conçus avec une vision à long terme, tenant compte des réalités économiques, sociales et environnementales de chaque nation africaine. En définitive, il est crucial de permettre aux États africains de diriger leurs propres transitions énergétiques, garantissant ainsi un développement durable et autonome.

En conclusion, plutôt que d’imposer des transitions énergétiques externes, il est crucial de permettre à l’Afrique de tirer parti de ses ressources naturelles et de mettre en place des projets adaptés à ses moyens, sans faire peser sur elle un sentiment de culpabilité.

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